La Mort Carmin

L'Antre => La Taverne => Atelier Ecriture => Topic started by: Tr0n on 06 October, 2006, 14:53:

Title: Nouvelle : Le rêve
Post by: Tr0n on 06 October, 2006, 14:53:

Ecrit vite fait entre midi et deux. Premier jet non retouché et non travaillé où l'on pige pas forcément grand chose smiley qui pue.



Ondée mécanique glissant sur les lisses parois d'une rocaille millénaire, éclaboussant généreusement mon visage d'une fraîcheur saisissante. Chaque goutelette se mélange à la sueur moîte de mes joues rosées voletant dans une étrange indescriptible harmonie. Les fragrances humides de ce jour de pluie titillent mes narines inexpérimentées face à tant de saveurs. La forêt alentours éveille mes sens, fait subtilement éclater mon esprit vagabondant au coeur d'une méditation éternelle en milliers de minuscules particules évaporant chacune de mes pensées. Les milles et une senteurs de cette lisière s'entremêlent dans un chant cérébral langoureux formant de nouvelles odeuridées. La monotonie de la nature se transforme au contact de la réflexion en des mots naissant, émergeant d'une âme torturée.

Je ? Il ?

Non il. Je se prend à m'évader. Il m'entraîne dans une folie éphémère de rèves idéalistes. A la limite d'une frontière infranchissable mon esprit et ses sens se croisent et se démèlent pour concrétiser une union fragile; des envies fébriles comme ces odeuridées à peine perceptible. Même l'auréole divine d'un soleil resplendissant ne parviendrait à faire vivre ses fusions du rève et du vrai.

J'ouvre les yeux. Toujours ce même temps maussade. La pluie cesse, le tonerre gronde; tout paraît gris comme la noirceur d'un coeur opaque. Le rève disparaît lentement, cédant la place à la translucidité des émotions physiques. Ce qu'il voit... Est ce bien la réalité ? En veut il ? L'eau claire s'échappe de la falaise au rythme tranquille d'une nature sans... sentiments. Vis je au travers de mes rêves  ou vit il par mes yeux ? L'eau devient opaque, dernier regard. Il plonge.

Parfois me demande-t-il l'esprit transgresse les idées reçues et devient la vraie prison de l'âme. Le regard parle, plonge, exprime, mais reste désespérément vide. Je vois ce bleu qui ruisselle sur la pente abrupte. Je pourrais comme sentir les couleurs. Ressentir. Furtif vent des méninges qui claque la grand voile d'une Nina fragile, blessant le coeur. Sentir fait jouir, voir fait mal, penser tue...

Azareen révait. La sueur perlait sur son front lorsqu'il se réveilla. La rosée d'une aube grise voilait dame Nature de sa robe étrangement translucide. Paradoxal ténébreux réveil. Elle ouvre les yeux, touche mon corps encore engourdi par le rêve, m'effleure de la douceur de ses mains. Je me souviendrais de la chaleur de la nuit, de nos deux corps réunis, simplement. Elle s'éloigne.

Title: Re : Le rêve
Post by: الغران　 on 06 October, 2006, 15:32:

Effectivemet, j'ai pas pîgé grand chose. J'vois pas trop où tu veux en venir, t'aurais du poster une fois que t'as fait au moins la trame complète, même si c'est à retrvailler :p

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 06 October, 2006, 15:38:

La trame elle vient après. La c'est une tentative d'exercice de style. C'est dur  :caché: pour exprimer un rève. J'écris comme ça vient après je vois déjà des trucs à travailler.

Title: Re : Le rêve
Post by: ۞ on 07 October, 2006, 19:09:

moins facile a lire que la nouvelle de maat. ton style est moins leger, ton champ lexical plus recherché mais moins facile a lire. bref je trouve que ca vire parfois a une demonstration  grammaticale et lexicale!
tu n'as pas cherché la simplicité aussi! il faut pouvoir reporter l'aspect decousu et brusque d'un reve. Tu t'en sors bien a ce sujet meme si je le repete, le style est un peu lourd.  :aie:

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 07 October, 2006, 22:27:

J'vais essayer d'alléger ca.

Title: Re : Le rêve
Post by: ۞ on 08 October, 2006, 17:19:

t'es pas obligé, c'est mon avis... Camille ne pense pas du tout comme moi, par exemple... et vu tout ce qu'elle a lu, je trouve qu'elle serait bien meilleure critique litteraire que moi.
Si tout le monde avait le meme avis, certains auteurs n'auraient pas forcement vendu.. :D

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 08 October, 2006, 17:20:

Bah je sais pas ce que pense les gens sur ce que j'ai écrit d'un premier jet là. Donc hésitez pas  :tudju:

Title: Re : Le rêve
Post by: ۞ on 08 October, 2006, 17:24:

j'ai pas hésité..  :p

mais quand je critique, je crainds toujours de vexer. Parce que moi meme je serais incapable d'ecrire une telle chose.
Mon seul roman est un roman inachevé, fait a 15ans... un policier qui plus est : un style que je n'apprecie pas forcement lire a la base... A l'epoque je lisais beaucoup, mais plus rien maintenant (je quitte le pc, je me couche, je dors... :( ). Donc je ne suis pas une référence.

Quand je dois critiquer un livre, ou un de vos texte : j'ai l'impression de faire le critique litteraire qui a du se rabattre sur ce boulot car ce qu'il produisait lui meme ne vallait pas grand chose...

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 08 October, 2006, 17:26:

Non je me vexe pas sur ce que j'écris. Au contraire, je fais passer un message au travers de ce texte :), après c'est la perception des autres qui est intéressante à comprendre, pour voir comment ils l'interprètent.

Title: Re : Le rêve
Post by: الغران　 on 08 October, 2006, 17:28:

Bah moi j'ai dit ce que j'en pensais : Que j'avais pas tout capté, ni où tu voulais en venir, après sic comme tu dis c'est un exercice de style, j'suis pas fan de l'étalage de technique pour l'étalage de technique :p
C'est un peu comme les solos de guitare, j'aime pas.
Mais j'me fourvoies pit-être sur tes motivations :D

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 08 October, 2006, 17:31:

Pas vraiment un exercice de style. Ca le devient parce qu'il est difficile avec des mots simples de faire passer des émotions parfois compliquées. Après justement ce qui m'intéresse au delà du style, c'est de savoir ce que vous avez perçu et ressenti en lisant les quelques lignes.

Motivations ? Pas vraiment de motivations profondes j'ai essayé de faire passer plusieurs émotions au travers d'une feuille de papier. C'est chaud smiley qui pue

Title: Re : Le rêve
Post by: €sY on 08 October, 2006, 18:57:

je sais pas c'est l'histoire d'un schizo non?     :caché:  je ...il


hu.


a pas compris.

Title: Re : Le rêve
Post by: Lio on 08 October, 2006, 20:19:

Mon avis ? Ca semble avoir ni queue ni tête, du coup ça reflète bien le flou qui accompage les rèves, mais on ne comprend pas trop ce qui se passe et j'aimerai pas avoir à lire tout un roman dans ce style là.
Tes champs lexicaux sont poétiques.
Je ne savais pas qu'odeuridée existait.

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 09 October, 2006, 08:20:

Je demande pas comprendre mais de ressentir :)

Title: Re : Le rêve
Post by: Eithel`Fea` on 09 October, 2006, 18:55:

/me prend le temps de lire le rêve...


Au début je voyais un nez (un nez quoi) sous la pluie, mais vu de l'intérieur, c'est à dire que je voyais le bout du nez et l'eau qui gouttait, et les senteurs que dégage généralement la pluie, qui sont effectivement "colorées", selon où on se trouve et quel vent les porte.
Après ca me donnait l'impression de quelqu'un hors de lui, dans le sens d'une sortie de corps, ou bien cette sensation juste avant de sombrer dans le sommeil de plus être dans notre corps, d'être ailleurs et ressentir les choses différement avec un recul et une proximité en même temps...

Et puis après le tonerre, comme un rappel à une réalité qu'on aimerai fuir, ou bien qu'on subi sans s'en plaindre vraiment.
Et le dernier paragraphe, j'avoue que je m'attendais pas à ce que le "je" ou le "il", prenne soudain un "visage" par un nom, et encore, pas le sien, celui de l'autre, qui prend corps physiquement. Brusque retour à la réalité en effet, puisque même dans les mots y a une rupture totale de décor. Et j'ai du mal à associer ce qu'il y a avant, à la personne qui s'éloigne en fait...
Bizarrement, tout ce qui est écrit avant me fait penser à des choses plus "générales".

Voilà, un ptit ressenti à la première lecture :)

Title: Re : Le rêve
Post by: El dude on 10 October, 2006, 00:35:

trop d'adjectifs  :D

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 10 October, 2006, 08:11:

C'est en cours de correction. Dès que j'ai une clé usb je le fais passer.

Quote

Et puis après le tonerre, comme un rappel à une réalité qu'on aimerai fuir, ou bien qu'on subi sans s'en plaindre vraiment.

Tout à fait. J'ai rajouté un paragraphe plus clair. C'est l'idée la plus importante en fait que je développe.

Quote

"je" ou le "il", prenne soudain un "visage" par un nom

J'ai aussi rallongé pour que le changement soit plus compréhensible. Le retour à la réalité sera néanmoins beaucoup plus violent.

Quote

trop d'adjectifs 

J'en rajoute mais plus judicieusement  :minusplus:

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 11 October, 2006, 10:58:

Second jet corrigé, l'histoire prend un peu plus forme. Les deux derniers paragraphes sont en retravail. Je pense avoir trouvé une trame intéressante :). Sinon j'ai l'impression que c'est plus fuilde et plus perceptible.


Ondée mécanique glissant sur les lisses parois d'une rocaille millénaire, éclaboussant généreusement mon visage d'une fraîcheur saisissante. Chaque goutelette, voletant dans une étrange et indescriptible harmonie, se mélange à la sueur moîte de mes joues rosées dans un florilège de saveurs aqueuses. Les fragrances humides de ce jour de pluie titillent mes narines inexpérimentées dans cette fabuluse danse des sens. La forêt alentours m'éveille, fait subtilement éclater mon esprit en milliers de minuscules particules évaporant chacune de mes pensées. Les milles et une senteurs de cette lisière s'entremêlent dans un chant cérébral langoureux formant de nouvelles odeuridées. La monotonie de la nature se transforme au contact de la réflexion en des mots naissant, émergeant d'une âme torturée. Vagabondant au coeur d'une éternelle méditation, un immense océan masque désormais mon odorat.

Je ? Il ?

Non il. Il se prend à m'évader. Il m'entraîne dans une folie éphémère de rèves idéalistes. A la limite d'une frontière infranchissable, mon esprit et ses sens se croisent et se mèlent pour concrétiser une union fragile: des envies fébriles comme ces odeuridées à peine perceptible. Même l'auréole divine d'un soleil resplendissant ne parviendrait à faire vivre ses fusions du rève et du vrai, de l'impossible et du concret, mariage d'un sens et d'une pensée.

J'ouvre les yeux. Progressivement, lentement, doucement.

Toujours ce même temps maussade. La pluie a cessé, le tonerre gronde; tout paraît gris dans le ciel comme la noirceur d'un coeur opaque. Les nuages se meuvent en somptueuses arabesques luminescentes, digression du divin dans l'équilibre manichéen de la nature; subtile opposition. Le rève disparaît, cédant la place à la translucidité des émotions physiques, perçant le linceul de la voûte céleste. Un rayon.

Ce qu'il voit... Est ce bien la réalité ? En veut il ?

L'eau claire s'échappe de la falaise au rythme tranquille d'une nature sans... sentiments. Elle vit, elle s'anime mais elle ignore la profondeur du désir. Elle l'ignore... Elle est la simplicité incarnée pourtant si complexe à comprendre. Parallélisme d'un idéal féminin ? Vis je au travers de mes rêves ou vit il par mes yeux ? Eternelle question d'une vie morne et terne malgré les éclairs qui zèbrent l'horizon. L'eau devient à son tour opaque, dernier regard.

Il plonge.

Furtif vent des méninges qui claque la grand voile d'une Nina fragile, blessant le coeur. Les pensées me transpercent le coeur, laissant des trous béants et amplis de ténèbres qui ne cicatriseront jamais. Sentir fait jouir, voir fait mal, penser tue. Réflexions vers un bonheur incertain. L'hérésie de toutes les vies compliquées. A mesure qu'il pense, dans une introspection destructrice, il se démolit. Plus il pense, plus il souffle sur les braises de son âme. Mais plus il souffle plus les braises s'éteignent.

Son nez ne sent plus. Ses yeux se referment. La fin est proche, mais je veux continuer, avec lui. Saisir chaque bribe de cette jouissance idyllique, de cette magnifique utopie, de cet instant unique. La toucher, revenir dans cette communion qui m'échappe. Mais qui suis je pour réclamer ce don ?

Azareen révait. La sueur perlait sur son front lorsqu'il se réveilla. La rosée d'une aube grise voilait dame Nature de sa robe étrangement translucide. Paradoxal ténébreux réveil. Elle ouvre les yeux, touche mon corps encore engourdi par le rêve, m'effleure de la douceur de ses mains. Je me souviendrais de la chaleur de la nuit, de nos deux corps réunis, simplement. Elle s'éloigne.

“ Tu es réveillé Emma ?”, d'une voix rauque encore engourdi par le court sommeil journalier.

Elle se rapproche, me frôle une nouvelle fois de son corps si parfait. Les yeux embués, je l'observe, décrivant ses courbes sous la soie. Elle est belle, mais elle l'est encore plus dans mes rèves. Les pensées se sont envolées, le rêve enfoui dans un profond subconscient, gardé par les barrières de mon coeur. Pourquoi me tourmente-t-elle chaque nuit ? Pourquoi parlons nous ? Elle ira voir un autre homme dans quelques heures.

Ses hanches, le creux de ses reins, ses seins, rien ne m'appartient.

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 11 October, 2006, 15:10:

En relisant là viteuf j'ai trouvé quelques fautes  :@

Title: Re : Le rêve
Post by: ۞ on 12 October, 2006, 08:34:

j'ai pas fait attention aux fautes.. je te fais confiance là dessus.

Bon bin je sais pas trop quoi en dire. C'pas un style que j'apprecie grandement : les phrases sans verbe, ça me bloque. trop haché selon mes gouts. Mais je suis certain que ça peut plaire a d'autres...

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 12 October, 2006, 09:16:

La suite arrive bientôt demain sans doute. Je rentre dans la trame. Le style change grandement par contre. Je vais essayer d'écrire un peu plus qu'une simple nouvelle sur cette base. Il s'agissait juste d'un petit prologue simulant un rêve et la torture du héros. Je viens de commencer un premier chapitre. Comme j'écris environ 1 h tous les soirs, je pense qu'il me faudra un peu de temps pour le pondre complètement. Je continue les corrections en essayant de rendre moins haché et plus fluide.

L'impression de hachures est rendu justement par le fait qu'il s'agit d'un rêve dans lequel le héro se raccroche pour éviter un réveil qu'il sait mortel pour son équilibre mental. Elle marque en fait l'instant où le réveil se fait contraint et forcer puis j'alterne avec des phases un peu plus douce et "adjectiveuse" qui j'espère montre bien la langueur, la tête dans le cul d'un rêveur.

Title: Re : Le rêve
Post by: Celis on 12 October, 2006, 09:43:

eh bien j'aime beaucoup comment tu ecris!  :) (ca me rappelle comment j'ecrivais avant)

et ta tiote nouvelle je la trouve pas mal du tout.

 :top:

Title: Re : Le rêve
Post by: Tr0n on 12 October, 2006, 12:08:

Elle est aussi très autobiographique vous l'aurez remarqué peut être. Je ne suis pas le branleur que je laisse entrevoir.  :p

Title: Re : Nouvelle : Le rêve
Post by: Tr0n on 13 November, 2006, 10:28:

Je pense vous foutre la suite demain matin si j'ai le temps de faire le transfert, de tout le premier chapitre. Il y aura encore une phase de retravail mais bon. Je me suis fixé un but sur ce premier volet: surprendre le lecteur tout en essayant d'entrer en profondeur dans les émotions du personnage principal (que je me garderais bien d'appeler héro par les gestes qu'il aura) par le biais de rêves, de remontées soudaine dans l'action, de description plus métaphorique des sentiments d'un homme.

Un projet et une idée viennent à mon esprit. Tout le monde n'est pas musiciens ou peintre, il est des arts qui peuvent parfois toucher tout autant quand on se donne la peine de les cultiver. Mon rêve serait d'arriver à trouver un écho des émotions que peut provoquer chez moi la musique dans la lecture. Quelle personne ne chavire pas face à quelqu'un qui joue un air romantique à la guitare ? Pourquoi ne pourrait on pas faire chavirer par l'écriture. That's my daily question.

Title: Re : Nouvelle : Le rêve
Post by: Tr0n on 14 November, 2006, 10:16:

Prologue: Le rêve

Ondée mécanique glissant sur les lisses parois d'une rocaille millénaire, éclaboussant généreusement mon visage d'une fraîcheur saisissante. Chaque gouttelette, voletant dans une étrange et indescriptible harmonie, se mélange à la sueur moite de mes joues rosées dans un florilège de saveurs aqueuses. Les fragrances humides de ce jour de pluie titillent mes narines inexpérimentées dans cette fabuleuse danse des sens. La forêt alentours m'éveille, fait subtilement éclater mon esprit en milliers de minuscules particules évaporant chacune de mes pensées. Les milles et une senteurs de cette lisière s'entremêlent dans un chant cérébral langoureux formant de nouvelles odeuridées. La monotonie de la nature se transforme au contact de la réflexion en des mots naissant, émergeant d'une âme torturée. Vagabondant au coeur d'une éternelle méditation, un immense océan masque désormais mon odorat.

Je ? Il ?

Non il. Il se prend à m'évader. Il m'entraîne dans une folie éphémère de rêves idéalistes. A la limite d'une frontière infranchissable, mon esprit et ses sens se croisent et se mêlent pour concrétiser une union fragile: des envies fébriles comme ces odeuridées à peine perceptible. Même l'auréole divine d'un soleil resplendissant ne parviendrait à faire vivre ses fusions du rève et du vrai, de l'impossible et du concret, mariage d'un sens et d'une pensée.

J'ouvre les yeux. Progressivement, lentement, doucement.

Toujours ce même temps maussade. La pluie a cessé, le tonnerre gronde; tout paraît gris dans le ciel comme la noirceur d'un coeur opaque. Les nuages se meuvent en somptueuses arabesques luminescentes, digression du divin dans l'équilibre manichéen de la nature; subtile opposition. Le rêve disparaît, cédant la place à la translucidité des émotions physiques, perçant le linceul de la voûte céleste. Un rayon.

Ce qu'il voit... Est ce bien la réalité ? En veut il ?
 
L'eau claire s'échappe de la falaise au rythme tranquille d'une nature sans... sentiments. Elle vit, elle s'anime mais elle ignore la profondeur du désir. Elle l'ignore... Elle est la simplicité incarnée pourtant si complexe à comprendre. Parallélisme d'un idéal féminin ? Vis je au travers de mes rêves ou vit il par mes yeux ? Eternelle question d'une vie morne et terne malgré les éclairs qui zèbrent l'horizon. L'eau devient à son tour opaque, dernier regard.

Il plonge.

Furtif vent des méninges qui claque la grand voile d'une Nina fragile, blessant le coeur. Les pensées me transpercent le coeur, laissant des trous béants et amplis de ténèbres qui ne cicatriseront jamais. Sentir fait jouir, voir fait mal, penser tue. Réflexions vers un bonheur incertain. L'hérésie de toutes les vies compliquées. A mesure qu'il pense, dans une introspection destructrice, il se démolit. Plus il pense, plus il souffle sur les braises de son âme. Mais plus il souffle plus les braises s'éteignent.

Son nez ne sent plus. Ses yeux se referment. La fin est proche, mais je veux continuer, avec lui. Saisir chaque bribe de cette jouissance idyllique, de cette magnifique utopie, de cet instant unique. La toucher, revenir dans cette communion qui m'échappe. Mais qui suis je pour réclamer ce don ?

Azareen rêvait. La sueur perlait sur son front lorsqu'il se réveilla. La rosée d'une aube grise voilait dame Nature de sa robe étrangement translucide. Paradoxal ténébreux réveil. Elle ouvre les yeux, touche mon corps encore engourdi par le rêve, m'effleure de la douceur de ses mains. Je me souviendrais de la chaleur de la nuit, de nos deux corps réunis, simplement. Elle s'éloigne.

“ Tu es réveillé Emma ?”, d'une voix rauque encore engourdi par le court sommeil journalier.

Elle se rapproche, me frôle une nouvelle fois de son corps si parfait. Les yeux embués, je l'observe, décrivant ses courbes sous la soie. Elle est belle, mais elle l'est encore plus dans mes rêves. Ses hanches, le creux de ses reins, admirable. Un sein que j'entrevois, souvenir de la tiédeur suave de sa peau. Les pensées se sont envolées, le rêve enfoui dans un profond subconscient, gardé par les barrières de mon coeur. La réalité, complice de mon esprit, achève de bâtir un mur autour de ma raison. Mon âme redevient froide et blafarde, insondable. Pourquoi me tourmente-t-elle chaque nuit ? Pourquoi parlons nous ? Elle sait qu'elle ira voir un autre homme dans quelques heures. Elle ne sent pas la jalousie qui m'envahit. La forteresse érigée par mon intellect atteint son instant de rupture, se craquelle, et je préfère le rêve. Je replonge.

Je la dévore les yeux clos. Je l'imagine, je la vois sans la voir, je la touche sans l'atteindre. J'élabore des chimères, des fantasmes que je partage avec elle sans les partager. Je fais sans qu'elle ne ressente. Elle est à moi dans un cocon ampli d'érotisme et de sensualité. Elle ne le sait pas, elle ne le sent pas, elle ne le voit pas, et je ne l'exprime pas. Je vis dans l'espoir ? Non dans un mirage. J'ai échoué.

Elle s'étire. Elle se lève. Un sourire.

«  Oui, je suis réveillée. » ajoute-t-elle d'un regard vitreux.

Elle va voir son amant j'en suis persuadé. La douleur est intense. Non elle ne va pas le voir, elle me le dit dans son regard, éternel reproche d'un immobilisme inquiétant. Elle n'aime pas les rêveurs... Dans mes illusions la nuit fût somptueuse. Dans la réalité... Le château de carte s'écroule.

La porte claque. La gorge serrée, la poitrine congestionnée, je me sens mal.

Et ce n'est que le début.

Chapitre Premier: Petite conversation entre amis

Kssss... Bonsoir et merci d'être fidèle à notre émission, ce soir dans notre journal, la découverte d'une nouvelle planète aux confins du système solaire; la justice condamne quatre membres d'un groupuscule éco-terroriste, responsable de l'attentat sur le building Everest il y a trois ans, à 5 années de travaux d'intérêts généraux et une peine d'emprisonnement de 8 ans avec 3 ans incompressibles... Ksss....

«  Non mais vraiment tu y crois à ce truc ? Les mecs ont tué 23 personnes et n'ont qu’8 ans d’ taule ? Sérieux ça commence à me gonfler. L'un des mecs est le fils de Hans Vedermoore, le boss de Dermacorp Industry. Tout le monde le sait en plus... Gerbant. »

Je souris. Joseph n'est pas un mauvais bougre et j'adore son ton familier, un jour critique littéraire, un autre critique politique, le lendemain farouche écologiste et le week-end extrémiste de la pire espèce. Il m'a toujours fasciné par cette adaptation au débat, par cette capacité d'argumentation sur tout et n'importe quoi. Et puis du haut de ses deux mètres et plus de cent kilos, je ne connais guère d'hommes ayant l'envi de s'y frotter d'un peu trop près. J'en suis même venu à me demander si l'imposante corpulence n'intervient pas dans inconsciement dans les discussions. L'imagination m'a souvent joué des tours et j'ai toujours l'impression qu'il en dit plus qu'il ne prononce.

« Sinon toi ça va ? », d'un ton condescendant.

Je souris. Il est doué pour alimenter les controverses mais ça ne va pas plus loin. Vingt années de mariage ont sans doute créer d'immenses montagnes infranchissables. L'expérience de tout un chacun se ressemble: se façonner une carapace qui masque les émotions. Son regard bleu clair plonge dans le mien à la recherche d'indices sur ma vie. Sa moustache frémit d'envie d'en savoir plus. Il a encore oublié son rasoir chez son amante vu l'état de son visage. C'est moi qui  ouvre le livre de son esprit. Ses légers cernes me parlent. Il a découché la nuit dernière. Sa belle le broie, je sens que le mensonge lui pèse. Un sentiment que je ne connaîtrais jamais.

« Non. »

Je souris. Je devrais lever la tête plus souvent. Un commerçant vient d'ouvrir son kiosque, un bouquiniste met en ordre ses dernières acquisitions, dont un Candide du dix-neuvième à première vue. Comme dans mon rêve, les émotions sont à chaque coin de rue. Des senteurs, des bizarreries, la vie qui fourmille, se lèvent au rythme d'un soleil de septembre chaleureux. Le clapotie d'une vieille péniche dont l'encre s'ébroue me sort de cette étrange torpeur journalière.

« Non pas du tout. »

Je souris. J'ai parfois aussi l'impression d'avoir quelque chose de Joseph dans l'expression de mes sentiments. Ma gorge se resserre, déglutition difficile. Je revois encore ce corps ce matin. Mes yeux se referment, mon esprit s'éloigne dans des profondeurs invisibles. Mes jambes flanchent et mon corps soudainement ne répond plus. Je suis loin. Loin de ce monde qui n'avance pas. Loin d'un monde fade, banal et inexpressif. Et pourtant je ressens ce qui m'entoure, qui vit mais qui reste falot et insipide, ou peut être... Naturel ? Les rêves sont si vivaces. Ils vous prennent, vous emporte dans un tourbillon de bonheur et tout ce qui vous entoure réellement devient alors inexistant, pâle et anodin.

« Aller mon gars, t'en trouveras d'autres des comme elle. C'est pas la première pute qui vient dans ton lit non plus », ajoute-t-il, accompagnant sa parole d'une bonne tape dans le dos.

« Non effectivement. Mais je me suis attachée à elle malgré sa situation. Je rêve plutôt qu'elle s'en soit rendu compte. Et pire encore j'ai l'impression qu'elle est incapable de m'aimer autrement que pour ce fric que je lui donne »

« Tu dois encore être l'un des rares qui pensent autrement qu'avec ton entrejambe mon coco, même si tu lui montres le contraire. Laisse toi aller un peu, profite, sois simple»

« C'est si simple à dire Joj, oui. J'aimerais pouvoir être ainsi mais tel n'est pas le cas. C'est la rançon de la réflexion, d'un esprit tortueux. Je doute donc je suis ne dit on pas ? Et pire encore chaque fois que je suis naturel, j'ai du mal à partager ceux que j'aime.»

« Ca passera avec l'âge et quand tu sauras parler de ce que tu ressens à ces demoiselles. Dis le lui, que tu l'aimes, qu'elle t'attire et que tu as du mal à l'exprimer. Soit toi même. Après si ça ne fonctionne pas c'est que ce n'était pas une femme pour toi. »

« C'est ce que dit tout le monde... L'échec ne signifie pas pour moi que ce n'était pas une femme pour moi mais que je n'ai pas su exprimer concrètement les choses. C'est beaucoup plus compliqué même. Et puis on devait pas préparer un truc ? »

J'ai toujours eu l'impression d'être aimé. Les relations humaines sont saugrenues d'après les sociologues, mais jamais je ne me suis senti agresser par l'autre, jamais je n'ai provoqué l'autre. J'ai sans cesse le sentiment d'être apprécié, que ce que je pense est toujours partagé, compris, et que mes seuls yeux suffisent à ce qu'on m'aime avec un grand A. A sans cesse vouloir comprendre l'Amour peut être me suis je perdu dans des rêves ?

Arrête de penser, focalise ton intelligence sur le coup de ce soir. Le coup de ta vie...

[ CA ME PLAIT PAS ICI JE COUPE. Je traite de l'arrêt dans un café très spécial. On passe dans le thème de l'action, mais j'ai souvent du mal à bien décrire les actions et donner du rythme. ]

Chapitre 2: Une soirée spéciale

1 h 32, les faisceaux des néons éclairent la rue Lecourt, brûlant mes yeux fatigués par le sommeil naissant. Deux heures que je patiente dans ce froid qui meurtrit mes doigts. Des grésillements presque imperceptibles m'assourdissent. Tout est vide, plus une seule présence humaine. J'attends. J'écoute et j'observe.

Le froid.

Une douce bougie s'allume et danse au deuxième étage. Ils doivent avoir fini. Les néons m'éblouissent, mais je capture un instant l'image de son corps à la fenêtre. Elle est là. Elle... Est... Là

[ TROU CA VA PAS DU TOUT :) ]

J'appuie sur la détente pour la seconde fois de la soirée. Ma vie s'obscurcit à jamais. Le premier coup a réussi, le second est un fiasco.


[ Sur la première partie et la rencontre avec Joseph j'aime pas du tout la tournure de phrase de la fin. Sinon vous aurez compris qu'on se dirige vers un polar très sombre smiley qui pue ]

Title: Re : Nouvelle : Le rêve
Post by: Tr0n on 12 March, 2007, 14:51:

Retravaux




Une ondée mécanique glisse sur les lisses parois d'une rocaille millénaire, éclaboussant généreusement mon visage d'une fraîcheur saisissante. Chaque gouttelette, voletant dans une étrange et indescriptible harmonie, se mélange à la sueur moite de mes joues rosées dans un florilège de saveurs. Les fragrances humides de ce jour de pluie titillent mes narines inexpérimentées. Une fabuleuse danse des sens. La forêt alentours m'éveille, fait subtilement éclater mon esprit en milliers de minuscules particules évaporant chacune de mes pensées. Les milles et une senteurs de cette lisière s'entremêlent dans un chant cérébral langoureux formant de nouvelles odeuridées. La monotonie de la nature se transforme au contact de la réflexion en des mots naissant, émergeant d'une âme torturée. Vagabondant au coeur d'une éternelle méditation, un immense océan masque désormais mon odorat.

Je ? Il ? Non il. Il se prend à m'évader. Il m'entraîne dans une folie éphémère de rêves idéalistes. A la limite d'une frontière infranchissable, mon esprit et ses sens se croisent et se mêlent pour concrétiser une union fragile: des envies fébriles comme ces odeuridées à peine perceptible. Même l'auréole divine d'un soleil resplendissant ne parviendrait à faire vivre ses fusions du rève et du vrai, de l'impossible et du concret, mariage d'un sens et d'une pensée.

J'ouvre les yeux. Progressivement, lentement, doucement.

Toujours ce même temps maussade. La pluie a cessé, le tonnerre gronde; tout paraît gris dans le ciel comme la noirceur d'un coeur opaque. Les nuages se meuvent en somptueuses arabesques luminescentes, digression du divin dans l'équilibre manichéen de la nature; subtile opposition. Le rêve disparaît, cédant la place à la translucidité des émotions physiques, perçant le linceul de la voûte céleste. Un rayon.

Ce qu'il voit... Est ce bien la réalité ? En veut il ?
 
L'eau claire s'échappe de la falaise au rythme tranquille d'une nature sans... sentiments. Elle vit, elle s'anime mais elle ignore la profondeur du désir. Elle l'ignore... Elle est la simplicité incarnée pourtant si complexe à comprendre. Parallélisme d'un idéal féminin ? Vis je au travers de mes rêves ou vit il par mes yeux ? Eternelle question d'une vie morne et terne malgré les éclairs qui zèbrent l'horizon. L'eau devient à son tour opaque, dernier regard.

Il plonge.

Furtif vent des méninges qui claque la grand voile d'une Nina fragile, blessant le coeur. Les pensées me transpercent, laissant des trous béants et amplis de ténèbres qui ne cicatriseront jamais. Sentir fait jouir, voir fait mal, penser tue. Réflexions vers un bonheur incertain. L'hérésie de toutes les vies compliquées. A mesure qu'il pense, dans une introspection destructrice, il se démolit. Plus il pense, plus il souffle sur les braises de son âme. Mais plus il souffle plus les braises s'éteignent.

Son nez ne sent plus. Ses yeux se referment. La fin est proche, mais je veux continuer, avec lui. Saisir chaque bribe de cette jouissance idyllique, de cette magnifique utopie, de cet instant unique. La toucher, revenir dans cette communion qui m'échappe. Mais qui suis je pour réclamer ce don ?

Azareen rêvait. La sueur perlait sur son front lorsqu'il se réveilla.

La rosée d'une aube grise voilait dame Nature de sa robe étrangement translucide. Paradoxal ténébreux réveil. Elle ouvre les yeux, touche mon corps encore engourdi par le rêve, m'effleure de la douceur de ses mains. Je me souviendrais de la chaleur de la nuit, de nos deux corps réunis, simplement. Elle s'éloigne.

“ Tu es réveillé Emma ?”, d'une voix rauque encore engourdi par le court sommeil journalier.

Elle se rapproche, me frôle une nouvelle fois de son corps si parfait. Les yeux embués, je l'observe, décrivant ses courbes sous la soie. Elle est belle, mais elle l'est encore plus dans mes rêves. Ses hanches, le creux de ses reins, admirable. Un sein que j'entrevois, souvenir de la tiédeur suave de sa peau. Les pensées se sont envolées, le rêve enfoui dans un profond subconscient, gardé par les barrières de mon coeur. La réalité, complice de mon esprit, achève de bâtir un mur autour de ma raison. Mon âme redevient froide et blafarde, insondable. Pourquoi me tourmente-t-elle chaque nuit ? Pourquoi parlons nous ? Elle sait qu'elle ira voir un autre homme dans quelques heures. Elle ne sent pas la jalousie qui m'envahit. La forteresse érigée par mon intellect atteint son instant de rupture, se craquelle, et je préfère le rêve. Je replonge.

Je la dévore les yeux clos. Je l'imagine, je la vois sans la voir, je la touche sans l'atteindre. J'élabore des chimères, des fantasmes que je partage avec elle sans les partager. Je fais sans qu'elle ne ressente. Elle est à moi dans un cocon ampli d'érotisme et de sensualité. Elle ne le sait pas, elle ne le sent pas, elle ne le voit pas, et je ne l'exprime pas. Je vis dans l'espoir ? Non dans un mirage. J'ai échoué.

Elle s'étire. Elle se lève. Un sourire.

«  Oui, je suis réveillée. » ajoute-t-elle d'un regard vitreux.

Elle va voir son amant j'en suis persuadé. La douleur est intense. Non elle ne va pas le voir, elle me le dit dans son regard, éternel reproche d'un immobilisme inquiétant. Elle n'aime pas les rêveurs... Dans mes illusions la nuit fût somptueuse. Dans la réalité... Le château de carte s'écroule.

La porte claque. La gorge serrée, la poitrine congestionnée, je me sens mal.

Et ce n'est que le début.

***

Kssss...

Un visage d'un beauté blonde aux yeux bleus apparaît.

Bonsoir et merci d'être fidèle à notre émission, ce soir dans notre journal, la découverte d'une nouvelle planète aux confins du système solaire; la justice condamne quatre membres d'un groupuscule terroriste, responsable de l'attentat sur le building Everest il y a trois ans, à 5 années de travaux d'intérêts généraux et une peine d'emprisonnement de 8 ans avec 3 ans incompressibles.

Kssss...

«  Non mais vraiment tu y crois à c'truc ? Les mecs ont zigouillé vingt trois personnes et ont qu’huit ans d’ taule ? Sérieux ça commence à m'gonfler. L'un des mecs est l'fils de  Vedermoore, le boss de Dermacorp Industry. Tout le monde le sait en plus... Vraiment c'est gerbatoire. »

Je souris. Joseph n'est pas un mauvais bougre et j'adore son ton familier. Un jour critique littéraire, un autre critique politique, le lendemain farouche écologiste et le week-end extrémiste de la pire espèce dans un vieux match de foot bidon. Il m'a toujours fasciné par cette adaptation au débat, par cette capacité d'argumentation sur tout et n'importe quoi. Et puis du haut de ses deux mètres, cent kilos de barbac, je ne connais guère d'hommes ayant l'envi de s'y frotter d'un peu trop près. J'en suis même venu à me demander si l'imposante corpulence n'intervient pas inconsciement dans les discussions. L'imagination m'a souvent joué des tours et j'ai toujours l'impression qu'il en dit plus qu'il ne prononce. Et ne parlons pas de sa vieille barde de beauf décadent papyboomer.

« Sinon toi ça va ? », d'un ton condescendant.

Je souris. Il est doué pour alimenter les controverses mais ça ne va pas plus loin. Vingt années de mariage ont sans doute créer d'immenses montagnes infranchissables dans l'expression de ses sentiments. L'empathie ? Un mot banni de son vocabulaire. L'expérience de tout un chacun se ressemble: façonner une carapace qui masque ses émotions. Son regard bleu clair plonge dans le mien à la recherche d'indices sur ma vie. Sa barbe frémit d'envie d'en savoir plus. Il a encore oublié son rasoir chez son amante vu l'état de son visage. C'est moi qui  ouvre le livre de son esprit. Ses légers cernes me parlent. Il a découché la nuit dernière. Sa belle le fait souffrir, je sens que le mensonge lui pèse. Un sentiment que je ne connaîtrais jamais...

« Non. »

Je souris. Je devrais lever la tête plus souvent. Un commerçant vient d'ouvrir son kiosque, un bouquiniste met en ordre ses dernières acquisitions, dont un Candide du dix-neuvième à première vue. Une douce et imperceptible brise voltige entre les peupliers des bords du quais. Elle perce ma peau de sa fraîcheur vivifiante. Comme dans mon rêve, les émotions sont omnipotentes, à chaque coin de rue. Des senteurs, des bizarreries, la vie qui fourmille, se lèvent au rythme d'un chaleureux soleil de septembre. Le clapotie d'une vieille péniche dont l'encre s'ébroue me sort de cette étrange torpeur devenue quotidienne. Je reviens progressivement à la réalité.

« Non pas du tout. »

Je souris. J'ai parfois l'impression d'avoir quelque chose de Joseph en moi. Casanier ? Ma gorge se resserre, déglutition difficile. Je revois encore ce matin, son corps. Elle. Elle hante chaque seconde de ma vie. Mes yeux se referment, mon esprit s'éloigne dans des profondeurs invisibles. Mes jambes flanchent et mon corps soudainement ne répond plus. Je suis loin. Loin de ce monde qui n'avance pas, antispirituel. Loin d'un monde fade, banal et inexpressif. Et pourtant je ressens ce qui m'entoure, qui vit mais qui reste falot et insipide, ou peut être... Naturel ? Les rêves sont si vivaces comme la petite bise qui me glaçait le sang à l'instant. Ils vous prennent, vous emporte dans un tourbillon de bonheur et tout ce qui vous entoure réellement devient alors inexistant, pâle et anodin.

« Aller mon gars, t'en trouveras d'autres des comme elle. C'pas la première pute qui vient dans ton pieu non plus », ajoute-t-il, accompagnant la parole franchouillarde d'une bonne tape dans le dos.

« Non effectivement. Mais je me suis attachée à elle malgré sa situation. J'aimerais qu'elle s'en soit rendu compte. Pire encore j'ai l'impression qu'elle est incapable de m'aimer autrement que pour ce fric que je lui donne »

« Tu dois encore être l'un des rares qui pensent autrement qu'avec ta queue mon coco, même si tu dois pas trop lui montrer ça. Laisse toi aller un peu, profite, sois simple»

« Justement Joj. Simple; c'est si simple à dire. J'aimerais pouvoir être simple mais c'est pas le cas. C'est la rançon de la réflexion me disait ma mère. Je doute donc je suis; non ? »

« Ca passera avec l'âge. Dis le lui, que tu l'aimes, qu'elle t'attire et que tu as du mal à l'exprimer. Soit toi même. Après si ça ne fonctionne pas c'est que c'était pas la bonne. »

« C'est ce que dit tout le monde... L'échec est il synonyme de mauvais amour ? De mauvais choix ? Pourquoi les routes se séparent si souvent... C'est beaucoup plus compliqué même. Trop chiant à expliquer, prise de tête. J'ai franchement pas envi de ça en ce moment. Et puis on devait pas préparer un truc ? »

J'ai toujours eu l'impression d'être aimé. Les relations humaines sont saugrenues d'après les sociologues, psychologues et autres médecins du cerveau, charlatan qui vous vendent une guérison hypothétique; j'ai sans cesse le sentiment d'être apprécié, que ce que je pense est toujours partagé, compris, et que mes seuls yeux suffisent à ce qu'on m'aime avec un grand A. A sans cesse vouloir comprendre l'Amour peut être me suis je perdu dans des rêves ?

Arrête de penser, focalise ton intelligence sur le coup de ce soir. Le coup de ta vie... Le changement.

***

1 h 32, les faisceaux des néons éclairent la rue Lecourt, brûlant mes yeux fatigués par le sommeil naissant. Deux heures que je patiente dans ce froid qui meurtrit mes doigts. Des grésillements presque inaudibles m'assourdissent. Tout est vide, plus une seule présence humaine. J'attends. J'écoute et j'observe.

Un vent gacial se lève, s'engouffrant dans la rue aussi insidieusement que dans ma chair; cet hiver qui vous mord le visage, qui brûle la peau comme cette femme me fait flamber l'âme. Une paisible bougie s'allume et danse au deuxième étage. Ils doivent avoir fini. Les néons continuent de m'éblouir, mais je capture un instant l'image de son corps à la fenêtre. Elle est là. Elle... Est... Là, belle comme une déesse, tout à la fois ma mère, ma fille, mon amante. Elle... Est... Tout. Elle est ma Vie.

La danse continue. Des ombres se projettent et s'amusent sur les murs.

<J'y arrive toujours pas ici>

J'appuie sur la détente pour la seconde fois de la soirée. Ma vie s'obscurcit à jamais. Le premier coup a réussi, le second est un fiasco.[/i]

Title: Re : Nouvelle : Le rêve
Post by: lepeintre on 15 March, 2007, 06:30:

A la première lecture j'ai accroché , mais je ne me sens pas à faire des critiques constructifs ce matin .

Title: Re : Nouvelle : Le rêve
Post by: Tr0n on 15 March, 2007, 09:19:

J'tiens beaucoup à finir ce texte.